La Salle Mozart et les mariages au 18ème siècle





Dans la rue du Miroir, au Numéro 1, faisant l’angle avec le rue des Serruriers, se dresse  une demeure élégante du XVIIIème siècle. C’est là que depuis le XIVème siècle, la tribu “au Miroir” (Zum Spiegel) avait son siège, son poêle.

Auberge, salle de réunion, de banquet, tout était là. Dans cette honorable tribu s’enregistraient les brossiers, peigniers, chapeliers, épingliers, passementiers, culottiers, pâtissiers, tapissiers, mais aussi pharmaciens, professeurs, savants, universitaires.
Bien évidemment, le siège fut reconstruit plusieurs fois, et pour la dernière en 1757-58. On  aménagea alors à l’étage une superbe salle de réception où les grands maîtres de la musique donnèrent des concerts aux strasbourgeois. Ainsi y dirigèrent Pleyel, Schoenfeld, et sur une plaque apposée sur la façade, on peut même y lire que Mozart, lors de son passage à Strasbourg en 1778, y a donné un concert.

Par le passé les Strasbourgeois étaient enregistrés dans six classes sociales et que pour cela  ils se devaient de respecter un habillement correspondant à leur état social. Pour les banquets, il en allait de même.
Ainsi, tout d’abord, ne pouvaient réserver une salle de prestige comme celle du poêle “Au Miroir” que les gens d’excellente moralité. Puis, vous alliez décider du “standing” de vos invités. En optant pour une “Freyhochzeit”, l’invitant prenait en charge tous les frais du banquet et des festivités, il annonçait en même temps que les cadeaux étaient inutiles : “On avait les moyens de se faire plaisir soi-même”. Seconde catégorie, moins prolifique, les “Gabenhochzeiten”. Cette fois les invités étaient plus ou moins priés d’ apporter des cadeaux, en revanche tous les frais de banquet étaient pris en charge par les invitants. Enfin, dernière classe, Les “Irtenhochzeiten”. Chaque invité était prié de payer sa part de festin.
Ces choses établies, il fallait ensuite commander le repas en fonction de l’échelle sociale. Les classes 6 et 5, celles considérées comme étant les plus aisées, avaient le droit de servir 8 plats; la classe 4 était déjà réduite à 6 plats, et les trois autres classes restantes se voyaient confinées à servir 4 plats. Bien évidemment, il y avait moyen de contourner ces prescriptions draconiennes. Les rôtis divers entraient comme plat unique, enfin, rien n’empêchait de servir des soupes, les légumes, les salades, les confiseries, les fruits et les desserts sans pour autant devoir faire référence à un plat.
Pour les boissons, les règlements souhaitaient de même une certaine discipline. Ainsi, pour dix personnes, il était convenable de servir deux pots de vin d’honneur. Bien évidemment, au cas où vous aviez choisi la “Irtenhochzeiten”, rien n’empêchait l’invité-payeur de consommer d’avantage et de payer discrètement de sa poche le surplus de consommation qui, du coup n’apparaissait pas sur la facture qui devait être soumise au contrôle. En cas de dépassement, les mariés écopaient d’une amende de quatre livres pfennig.




Selon Guy Trendel
in “Dernières Nouvelles d’Alsace”